Art & Design

La Biennale Cinema: comment Cartier y construit son idéal esthétique

Cristina D’Agostino

By Cristina D’Agostino25 septembre 2025

La 82e édition du Festival international du film de Venise a su briller par sa sélection engagée, à l’image du Lion d’argent décerné à Kaouther Ben Hania («The Voice of Hind Rajab»). Le joaillier Cartier, partenaire pour la cinquième année, y trouve un terrain d’expression rêvé: défendre la liberté et l’universalité des langages créatifs. Et ancrer dans l’inconscient collectif son idéal esthétique.

La panthère de Cartier s’affiche en grand sur la façade de la Punta della Dogana, juste à côté de la Basilique Santa Maria della Salute. Pendant la Mostra Cinema, la marque de joaillerie est le partenaire officiel du festival.

La scène de la Mostra résonne parfaitement avec nos engagements. Venise incarne nos valeurs, celles de la créativité, de l’excellence.

Arnaud Carrez, vice-président et directeur marketing de Cartier

Sur le lungomare Marconi, au plus fort de l’été, le rituel est immuable: méticuleusement, l’immense tapis rouge qui borde le Palazzo del Cinema menant à la Sala Grande est déroulé, à quelques pas des baigneurs, ravis d’observer les préparatifs, alanguis au soleil. Podium à photographes, écrans géants, drapeaux, panneaux publicitaires XXL, tout est en place. La Mostra de Venise, ses programmations et cérémonies bien rodées peuvent alors commencer.

La grande avenue du Lido di Venezia se mue alors en immense point névralgique du 7e art. Stars, fans, sponsors, journalistes, producteurs et jeunes espoirs y convergent pour quinze jours de frénésie et d’émotions, qui chaque soir prennent possession de Venise. La Sérénissime invite le public à vibrer à chaque projection. Plus ancien festival du cinéma au monde, La Mostra del cinema di Venezia ne veut pas se résumer à un palmarès. Elle veut montrer, inspirer, inviter à réfléchir, suggérer des esthétiques ou des points de vue, révéler des talents. La ville au lion ailé devient ainsi l’autre cité des anges, où succès et rumeurs se font et se défont. La Mostra gagne chaque année davantage son statut de festival capable de propulser ses films au rang de grands favoris pour les oscars.   

Les actrices Emma Corrin et Riley Keough, égéries Cartier, faisaient partie des stars internationales présentes sur l'avenue du Lido di Venezia (Cartier)

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Un soutien à la création et au patrimoine culturel

Autre animal, autre légende: face au Gritti Palace, c’est un félin géant qui a pris possession des lieux. La panthère de Cartier s’affiche en grand sur la façade du bâtiment de la Punta della Dogana, juste à côté de la Basilique Santa Maria della Salute. Pendant la quinzaine de la Mostra Cinema, la marque de joaillerie est le partenaire officiel du festival. À ce titre, depuis cinq ans, la marque tisse des ponts entre ses territoires culturels, ses langages esthétiques, ses icônes du style et ceux de la Mostra.

Le cinéma nous permet de réfléchir à la manière dont nos bijoux s’insèrent dans la vie des gens

Pierre Rainero, directeur du style et du patrimoine de Cartier

Pour Arnaud Carrez, vice-président et directeur marketing de Cartier, ce lien existe avant tout sur le terrain de l’émotion: «Le cinéma aborde des thèmes sociaux, politiques, existentiels. Mais c’est un langage universel, accessible à tous, qui exprime les émotions de manière immédiate.»

Les actions de Cartier, toujours plus nourries chaque année, célèbrent tantôt la richesse du patrimoine de Venise avec la restauration du Teatro Verde sur l’île de San Giorgio Maggiore, tantôt des célébrations culturelles comme le spectacle musical Ciao Casanova ou encore l’architecture avec cette année l’exposition The Fondation Cartier pour l’art contemporain by Jean Nouvel à la Fondazione Giorgio Cini. Ces événements, organisés en marge de la Mostra ne sont pas organisés par la marque, mais ils en reçoivent le soutien.

Le cinéaste Julian Schnabel (au centre) a reçu le Prix Glory to the filmmaker de la Mostra (en partenariat avec Cartier) pour son film In The Hand of Dante. Le prix a été remis par Jean-Rodolph Ratzel, directeur général de Cartier Europe du Sud-Est et Alberto Barbera, président exécutif du Festival international du film de Venise (S. Pessina)

Mais c’est surtout de cinéma dont Cartier veut parler dans ses récits et au fil de ses présences. Le Prix Glory to the filmmaker, créé en 2006 par la Biennale de Venise et remis en partenariat avec la marque depuis 2021, a récompensé cette année le grand cinéaste Julian Schnabel. Pour Arnaud Carrez : «La Mostra n’est pas qu’un festival: elle s’inscrit dans la Biennale de Venise. C’est une plateforme d’ouverture, d’innovation et de créativité. C’est pour cela que cette scène résonne parfaitement avec nos engagements. Venise incarne nos valeurs, celles de la créativité, de l’excellence. C’est une ville d’ouverture, sa beauté est inégalable.»

Pour Arnaud Carrez, vice-président et directeur marketing de Cartier, la Mostra de Venise est un événement majeur dans le calendrier de la marque (Jean-François Robert)

Dans le calendrier des prises de paroles stratégiques de la marque, la Mostra occupe une place importante, selon les dires des cadres dirigeants présents. Bien que les budgets ne soient pas communiqués, l’événement varie pourtant en intensité selon les années. Lorsque la Mostra est en concomitance avec l’exposition biennale internationale Homo Faber – consacrée à l’artisanat d’excellence –, l’événement prend une dimension plus large pour Cartier, qui n’hésite pas à inviter ses clients du monde entier pour profiter du glamour du festival et des créations des métiers d’art de la marque. Pour autant, Arnaud Carrez tient à nuancer: «Tout cela ne relève pas seulement de la communication mais aussi d’une démarche artistique et culturelle cohérente avec qui nous sommes. Cartier a toujours fait preuve de générosité, non pas seulement en matière de soutien, mais en contribuant à des projets qui ont du sens. La Mostra met en avant des réalisateurs d’horizons divers. Cette liberté de création, nous la portons également.»

Le cinéma, vecteur d’émotions et de sens

L’œuvre collective est une dimension qui nous rapproche du cinéma. Comme lui, derrière une œuvre, un bijou, il y a des métiers, des talents qui travaillent ensemble

Pierre Rainero, directeur du style et du patrimoine de Cartier

Autre point fort de la Mostra, les masterclasses 2025, intitulées The art and craft of cinema, auront toutes été sponsorisées par la marque. Lors de ces rencontres, les professionnels du cinéma, qu’ils soient devant ou derrière la caméra, réalisateurs ou artisans, partagent leurs pratiques du métier. C’est un point que Pierre Rainero, directeur du style et du patrimoine de Cartier tient à souligner: «L’œuvre collective est une dimension qui nous rapproche du cinéma. Comme lui, derrière une œuvre, un bijou, il y a des métiers, des talents qui travaillent ensemble. C’est une œuvre collective. L’émotion n’existe que quand le spectateur au cinéma ou la personne qui porte ou voit porter un bijou perçoit cette authenticité.»

Pour Pierre Rainero, directeur du style et du patrimoine de Cartier, le cinéma est un vecteur de sens, comme le sont les bijoux (Jean-François Robert)

Plus largement, à la question des raisons qui poussent Cartier à soutenir l’univers du cinéma, Pierre Rainero poursuit: «Il s’agit avant tout de la création d’une émotion artistique. Le cinéma en offre à foison, mais le bijou aussi est à l’origine d’un certain type d’émotion, par sa forme, son dessin ou ses pierres. Il parle de notre lien avec l’univers de la permanence, par rapport à l’impermanence de la vie. Un peu comme le cinéma d’ailleurs, qui raconte des histoires inscrites dans une époque, mais qui touchent de façon universelle et deviennent permanentes. C’est cette capacité à porter du sens qui fait la richesse du bijou. Ainsi, le cinéma est un vecteur absolu de sens.»

L’esthétique de Cartier, cependant, ne se lit pas uniquement dans son soutien à des festivals de films, un lien qui remonte aux années 90, lorsque Cartier était partenaire du Festival du cinéma américain de Deauville jusqu’au début des années 2010. C’est aussi en raison de sa présence à l’écran, dans un nombre important de films. Un rayonnement qui démarre en 1926, avec l’acteur Rudolf Valentino dans le film The Son of the sheik, où on le voit porter sa montre Cartier Tank. Ou encore dans La Belle et la Bête de Jean Cocteau, sorti en 1946, où Josette Day pleure de véritables diamants en forme de poire, prêtés par Cartier. «Un faux diamant ne brille pas, a fait remarquer Cocteau, seul un vrai diamant scintille.» Plus récemment, c’est dans le film The Phoenician scheme de Wes Anderson, sorti en 2025, que Cartier tient le haut de l’affiche avec un collier chapelet spécialement commandé par le réalisateur. Serti de rubis, d’émeraudes et de diamants, l’accessoire précieux a été créé pour le film, inspiré d’un pendentif en forme de croix réalisé par Cartier dans les années 1880.

C’est bien là que l’esthétique de Cartier réussit à s’insérer dans l’imaginaire collectif. Pierre Rainero explique: «C’est une célébration de la créativité. À Venise, le cinéma est au centre de l’attention. Nos créations y trouvent leur place, mais ce partenariat dépasse largement la question du produit. Nos créations à l’écran répondent aussi à cette célébration de la création. Wes Anderson, par exemple, est venu me voir à Paris avec son scénario. Il avait besoin de plusieurs objets, très précis, et nous a demandé si nous pouvions l’aider. Pour lui, rien n’est accessoire, chaque objet du film a un rôle. Nous avons discuté. Certains objets existaient déjà dans nos archives. Finalement, nous nous sommes mis d’accord sur un collier avec une croix, que nous avons retravaillé. Nous y avons trouvé un vrai champ d’expression commun.» Puis il conclut: «Le cinéma nous permet de réfléchir à la manière dont nos bijoux s’insèrent dans la vie des gens.»

Dans The Phoenician scheme de Wes Anderson, Cartier tient le haut de l’affiche avec un collier chapelet spécialement commandé par le réalisateur. Serti de rubis, d’émeraudes et de diamants, l’accessoire précieux a été créé pour le film, inspiré d’un pendentif en forme de croix réalisé par Cartier dans les années 1880 (TPS Productions/Focus Features)

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