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Quand le vin donne une voix aux artistes

Aymeric Mantoux

By Aymeric Mantoux22 juillet 2021

Après Château la Coste et la Commanderie de Peyrassol, le Bonisson Art Center vient de sortir de terre, en Provence, flanqué au domaine viticole éponyme. Depuis les Rothschild à Mouton, il y a plus de quatre-vingt ans, les rencontres entre l’art et le vin se multiplient. Un mariage de raison?

Le Château Bonisson dans le village de Rognes, en Provence (DR)

À un jet de pierres de Château La Coste, les collines de garrigue enserrent le charmant village de Rognes. Sur les hauteurs, les vastes terrasses argilocalcaires sont plantées de vignes depuis des centaines d’années. Au détour d’une petite route bordée de platanes, une plaque indique l’entrée du Château Bonisson. En contrebas, à droite, un chai à barriques en pleine construction. Juste derrière, le White cube en béton brut tout juste inauguré ce printemps se marie parfaitement à l’ancien bâtiment viticole. Voulu par un collectionneur avisé, Christian Le Dorze, passionné par l’art géométrique et concret, le centre d’art expose ses coups de cœur. En mai, il y exposait Georges Rousse, cet été il poursuit avec Nicolas Chardon et Michel Verjux. «Je suis collectionneur depuis des années, et j’avais déjà organisé plusieurs expositions à Dijon dans un lieu qui avait reçu de belles marques d’intérêt», confie l’ancien médecin et propriétaire d’un groupe de cliniques privées, aujourd’hui résident suisse. «Je poursuis ma passion pour l’art et la transmission avec ce centre d’art que j’ai voulu totalement indépendant. J’y accueille gratuitement tous les visiteurs.»

Œuvre de Georges Rousse exposée au Château Bonisson (DR)

Bien que l’art participe toujours à l’image des marques de vin ou de champagne qui communiquent par ce biais, cela ne commence pas toujours pas une réflexion marketing

Roxana Azimi, journaliste et critique d’art

Le plus souvent, c’est lui-même qui effectue les visites guidées, de plus en plus nombreuses, aux passionnés qui empruntent le circuit touristique des fondations d’art du sud de la France. L’incroyable Château La Coste et son immense parc de sculptures est tout proche, La Commanderie de Peyrassol n’est pas très loin. Ces dernières années, art et vin semblent faire bon ménage. «Bien que l’art participe toujours à l’image des marques de vin ou de champagne qui communiquent par ce biais, analyse Roxana Azimi, journaliste et critique d’art, cela ne commence pas toujours pas une réflexion marketing. Il y a de gros ratages, comme c’est le cas avec Pommery, et de vraies réussites comme Peyrassol.» C’est plutôt dans cette direction que Bonisson semble partir, avec une programmation bien réfléchie et une gestion de l’ensemble entre les mains d’une seule personne, en toute cohérence avec le domaine viticole du même nom.

Les artistes façonnent les vignobles et les chais

Christian Le Dorze, passionné d'art contemporain et propriétaire du Château Bonisson (DR)

Lorsque nous lui avons rendu visite, il prenait plaisir à expliquer aux visiteurs présents les tenants et les aboutissants du travail de Georges Rousse sur l’anamorphose. Un principe artistique singulier qui consiste à concevoir une image qui ne se révèle qu’à un point de vue. Il est à la base du travail de Georges Rousse depuis quarante ans et c’est à lui qu’est revenu l’honneur d’inaugurer le centre d’art du Château de Bonisson, à Rognes. Peintre, photographe, artiste conceptuel bien connu depuis les années 1970, Rousse est également un ami proche du nouveau propriétaire du domaine acquis il y a quatre ans. Bonisson était en très mauvais état. Il a fallu tout refaire. Le nouvel acquéreur confie alors à l’artiste la transformation des espaces intérieurs abandonnés. Rousse se les approprie entièrement, condamnant des portes, découpant des cloisons, pour y aménager des formes géométriques éphémères, colorées, puissantes, intrigantes dans des endroits voués à disparaître. Il crée alors des formes étonnantes, déconcertantes, surtout lorsqu’on les observe depuis le point de vue décidé par l’artiste qui révèle la juste perspective. Autrement, le jeu de distorsions, la «grammaire roussienne», ne fonctionne pas.

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