Voyage & Bien-être

Engelberg, le glamour Belle Époque renaît

Cristina D’Agostino

By Cristina D’Agostino29 juillet 2021

Les fastes de la Belle Époque et ses quatre décennies d’insouciance ont forgé la réputation de la station alpine suisse d’Engelberg. Aujourd’hui, de nombreux investisseurs redonnent vie au glamour des années 1900.

L'hôtel Kempinski Palace Engelberg inauguré en juin dernier (DR)

Plus grande station alpine de Suisse centrale, Engelberg est aujourd’hui au cœur d’un renouveau touristique. Les nombreux investissements consentis dans les rénovations hôtelières de la place et les diverses infrastructures sportives permettent de placer le village abbatial sur l’échiquier des stations de montagne championne du chic décontracté.

A Engelberg, le luxe, c’est la nature. Nous attirons des clients qui aiment le chic décontracté proche d’une philosophie de la durabilité

Alexandra Ellerkamp, directrice marketing du kempinski Palace Engelberg

Au cœur de ce retour au glamour Belle Époque, l’hôtel kempinski Palace Engelberg, qui vient d’être inauguré. L’esprit «Grand hôtel» très couru par l’aristocratie, puis la bourgeoisie des années 1860 à 1900 y a été respecté. Seule exception, la grande salle de bal, transformée aujourd’hui en lobby. Partout, les matériaux choisis magnifient les contrastes entre la partie historique de 1905 et la nouvelle aile. Si l’ambiance est Belle Époque, les dernières innovations technologiques équipent l’ensemble du complexe hôtelier. Un Spa et une piscine au dernier étage du palace permettent de se ressourcer face aux montagnes, comme il était déjà couru de le faire après la Grande Dépression.

Entre 1870 et 1914, l'esprit Belle Époque régnait à Engelberg. Au premier plan, le Grand Hôtel Titlis devenu le Kempinsi aujourd'hui et sur les hauteurs, le Grand Hôtel Terrace (DR)

Un investisseur chinois

Si le kempinsky opère les lieux - une stratégie éprouvée par le groupe depuis longtemps - le propriétaire n’est pas issu du sérail local. Il est Chinois, et bien connu de la région, puisqu’il a déjà investi dans plusieurs infrastructures de constructions et d’immobilier (Frutt Resort AG) des environs. Yunfeng Gao, entrepreneur de Shenzhen rachète le Grand Hotel Titlis Palace en 2011 et le rénove pour en donner les clés au groupe Kempinski en 2021. Mais d’autres établissements bien connus des touristes sont également en main du tycoon chinois, dont l’hôtel Frutt Mountain Resort, un lieu chic et décontracté à Melchsee-Frutt, à environ six heures de marche d’Engelberg, mais aussi le Tannalp ou encore le Palace Luzern qu’il rachète au groupe hôtelier suisse Victoria-Jungfrau Collection, en 2015.

Engelberg compte parmi les dix meilleurs spots au monde pour le freeride

Philipp Oeschger, product manager à l’office du tourisme Engelberg-Titlis

Aujourd’hui, la plupart des grands hôtels de l’époque sont en rénovation à Engelberg, dont le Grand Hôtel Terrace aujourd’hui en main du consortium Bergbahnen Engelberg-Trübsee-Titlis AG. La station alpine au cœur de la Suisse, à 30 minutes de Lucerne, est idéalement placée pour attirer la clientèle suisse et internationale. Si le Frutt Mountain Resort est fréquenté à 97% par les Suisses, le kempinski vise au moins 60% de son taux d’occupation par la clientèle helvétique. L’autre grande nation fan d’Engelberg? «Bien sûr l’Inde, plus que la Chine, mais surtout la Suède, explique Philipp Oeschger, product manager à l’office du tourisme Engelberg-Titlis. La raison? Engelberg compte parmi les dix meilleurs spots au monde pour le freeride.» Si les Anglais affectionnent particulièrement Verbier pour les mêmes raisons, les murs de neige des montagnes environnantes surnommés les Big Five sont appréciés des Suédois. Les plus expérimentés iront tester l’Atomic Corniche sur le Steinberg ou l’Adrenaline Couloir sur le Sulz. Le ski à Engelberg est réputé, tout comme ses douze VTT Trails, ses six via ferrata ou ses 500 km de chemins de randonnée pédestre, en été.

L'un des cinq versants des Big Five, sur lesquels pratiquer le freeride. Ici sur le Steinberg (DR)

La nature, le nouveau luxe

Lancée vers un renouveau, la station d’Engelberg attire les amateurs de nature, de sport, de détente et de luxe discret. Alexandra Ellerkamp, directrice marketing du kempinski Palace Engelberg explique: «A Engelberg, le luxe, c’est la nature. Nous attirons des clients qui aiment le chic décontracté proche d’une philosophie de la durabilité. Une clientèle qui veut venir boire un verre dans notre magnifique lounge-bar en jeans et chaussures de montagne ou en habits après-ski. Une clientèle plus jet-set sera plus adepte du kempinski de St-Moritz par exemple.»

Plusieurs grands circuits sur cinq jours mis en place par l’office du tourisme d’Engelberg-Titlis permettent de découvrir la région, selon le niveau d’effort. Monter à pied sur le Fürenalp pour un Alpine Cheese Trail ou en cabine tournante sur le Titlis pour découvrir la grotte de glace et le vertigineux Cliff Walk, se lancer sur une via ferrata à Fürenalp ou s’élancer en VTT le long du Traildorado de la Surrenen Valley, les installations ultramodernes permettent de perdre le moins de temps possible entre deux excursions.

Évidemment, l’esprit Belle Époque des années 1870 à 1914 privilégiait les cures thermales plus que les virées en montagne. C’était même pour ces bienfaits que les Britanniques avaient élus domicile en saison estivale à Engelberg. De nombreux intellectuels y passaient leur villégiature, dont le prix Nobel de littérature Rudyard Kipling. La bourgeoisie montante de la seconde partie du 19ème siècle disposait de moyens financiers conséquents pour profiter de la nature en montagne l’été.

Une vue du Schluchberg. Engelberg compte plus de 500 km de chemins de randonnée pédestre (DR)

C’est grâce à l’essor des cures thermales, de besoin d’air pur et de nature en altitude qu’Engelberg se construisit sa notoriété. Les premiers grands hôtels de style aristocratique édifiés dans les années 1870 ont alors signé l’entrée de la station dans la liste très sélecte des lieux de villégiature. Mais, dès la fin de la Grande Guerre, la station voit son lent déclin s’amorcer. La Seconde Guerre mondiale met un coup d’arrêt définitif à l’exploitation de plusieurs grands hôtels. En 1945, un expert fédéral ordonne même la démolition des thermes. Et les années 1970 voient un autre style de tourisme s’installer, plus simple et éloigné des grands fastes désuets.

Aujourd’hui, cinq décennies plus tard, la montagne semble retrouver le même attrait qu’il y a 150 ans. L’air pur, la nature, les activités en plein air, l’envie d’un chic décontracté sont de retour. Les rues d’Engelberg s’animent de bars et de restaurants d’inspiration internationale. Le restaurant Ober à l’hôtel Alpenclub propose une gastronomie mêlant influences nordiques et locales, alors que chaque matin l’odeur du café torréfié embaume la rue principale du village d’Engelberg. Deux jeunes suédois Sophia et Oscar, passionnés par le métier, ont parié sur une production artisanale de café. Des graines du Brésil, d’Ethiopie, du Guatemala sont acheminées jusqu’à Engelberg pour être torréfiées et servies sur place, dans leur café-librairie Roastery, pour le grand plaisir des habitants du coin ou expédiées aux quatre coins du monde via internet.

Le glamour Belle Époque 4.0 à Engelberg, un concept qui devrait croître encore.

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