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Diamant: l’Angola fait une offre à De Beers

Eva Morletto

By Eva Morletto17 novembre 2025

Malgré une industrie en crise, l’Angola, marché clé du diamant, se dit prêt à racheter les parts (85%) détenues par la société Anglo American dans la firme diamantaire sud-africaine De Beers, avec sa société Endiama.

Endiama, la société nationale angolaise du diamant, a proposé une offre destinée à racheter la participation majoritaire (85%) d’Anglo American dans De Beers, qui reste un acteur clé du secteur (2,7 milliards de dollars de revenus enregistrés en 2024 et une valorisation à 4,9 milliards de dollars) (De Beers)

Avec cette annonce, l’Angola bouscule le marché mondial du diamant, en pleine crise depuis 2022. Après des années d’expansion accélérée, l’ex-colonie portugaise a produit 10,7 millions de carats sur les neuf premiers mois de l’année et vise un nouveau record de 14,8 millions de carats pour 2025. Avec 14 millions de carats de diamants bruts produits en 2024, le pays se place désormais au-dessus des volumes produits par le Botswana, pour la première fois en vingt ans, selon le Processus de Kimberley.

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Ces chiffres, alimentés par la gigantesque mine à ciel ouvert de Catoca et d’autres gisements, traduisent une stratégie nationale d’industrialisation des ressources.

Dans ce contexte, Endiama, la société nationale angolaise du diamant, a proposé une offre destinée à racheter la participation majoritaire (85%) d’Anglo American dans De Beers. La maison mère a en effet annoncé vouloir céder ses parts dans le cadre d’un plan de restructuration engagé depuis 2024. Si l’opération d’envergure financière venait à être finalisée, elle représenterait une révolution pour la filière.

Si aujourd’hui Anglo American en est l’actionnaire majoritaire, le gouvernement du Botswana lui possède les 15% restants et a fait savoir depuis septembre son souhait de porter sa participation à plus de 50%. Le Botswana génère environ un tiers de ses recettes fiscales et 80% de ses exportations du diamant, tandis que l’Angola cherche à diversifier son économie, encore largement tributaire du pétrole.

Quelles conséquences la prise de contrôle de l’Angola sur De Beers peut-elle avoir? Tout d’abord, les premiers impacts concerneraient le marché de la haute joaillerie: De Beers reste un acteur clé du secteur (2,7 milliards de dollars de revenus enregistrés en 2024 et une valorisation à 4,9 milliards de dollars), capable de pressuriser l’offre et le calendrier des ventes de diamants bruts. Le groupe pèse entre un quart et un tiers de l’offre mondiale de gemmes brutes, lui conférant un rôle déterminant dans la fixation des prix et dans la disponibilité des pierres de qualité.

Sur le plan économique africain, les retombées seraient immédiates et durables: les ressources pourraient rester localisées davantage sur le continent, ainsi que les activités annexes (taille et polissage, par exemple). Les recettes fiscales et l’emploi industriel pourraient aussi croître: le basculement est d’autant plus significatif que le Botswana a réduit sa production ces dernières années, affaiblissant ses revenus pendant que l’Angola montait en puissance.

Il reste toutefois des points à éclaircir: il faudrait comprendre avant tout comment cette acquisition serait financée, étant donné que le gouvernement de Luanda a indiqué que le budget national ne financerait pas l’opération. Le risque de crispation diplomatique avec le Botswana est aussi un enjeu à prendre en compte.

Dans une perspective plus vaste, si De Beers se retrouvait sous influence angolaise, ce serait une bonne nouvelle pour l’Afrique, le marché local africain serait alors boosté. Mais cela pourrait aussi générer davantage d’instabilité sur le marché mondial des diamants, qui est déjà en train de chercher un équilibre face à une demande plus faible, due aux instabilités géopolitiques majeures qui affectent la planète et à la concurrence accrue des diamants synthétiques.

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