Style & Évasion

Corinne Suter: «Pour gagner, la clé n’est pas d’être spécial, mais d’avoir du plaisir»

Cristina D’Agostino

By Cristina D’Agostino27 février 2023

La championne olympique de descente et médaillée de bronze aux récents Mondiaux de ski de Méribel, était à Crans-Montana pour l’épreuve de descente. La Schwytzoise Corinne Suter, quatrième au classement de la spécialité raconte comment elle aborde la suite de la saison et ce qui l’a poussé à revenir au meilleur de sa forme après sa chute spectaculaire à Cortina.

Corinne Suter est championne du monde en titre de descente (Hublot)

Alors que les organisateurs de la Coupe du Monde à Crans-Montana n’ont finalement pu donner le départ que d’une seule course, celle de l’épreuve de descente, à cause d’un brouillard persistant et d’une neige trop molle le samedi 25 février, la championne du monde en titre Corinne Suter n’aura terminé qu’à la 20e position, ce dimanche 26 février. En marge de la compétition, la skieuse de 28 ans a rencontré quelques membres de la presse, à l’invitation de son sponsor horloger Hublot.

Comment vous sentez-vous ?

Je me suis sentie en forme lors des essais, j’ai maintenant bien récupéré. Je peux enfin skier comme je veux, après mon accident. Je suis toujours heureuse de revenir à Crans-Montana, là où tout a commencé pour moi. J’ai de beaux souvenirs ici; j’avais déjà le sourire en arrivant. L’ambiance est toujours très particulière, chaleureuse, le public est là, pour nous soutenir, même lors des essais. C’est incroyable de voir autant de gens aimer ce sport. Il y a quelque chose de spécial à Crans-Montana, car cet engouement ne se ressent pas forcément ailleurs.

Corinne Suter était à Crans-Montana ce dimanche 26 février pour la course de descente (Corinne Suter)

Vous avez reçu la médaille de bronze récemment aux Mondiaux de Méribel, un soulagement ?

La médaille de bronze à Méribel m’a beaucoup aidé à reprendre confiance en moi. Car avant cela, je ne savais pas s’il était encore un peu tôt pour moi de reprendre les courses, après ma chute. En descente, vous savez, il est vraiment primordial de pouvoir se faire confiance à 100%. Quand vous n’êtes qu’à 80%, vous skiez un peu sur l’arrière et vous ne laissez pas aller le ski. Vous perdez ainsi beaucoup de temps.

Le ski vit aujourd’hui une passe incertaine, liée aux conditions climatiques, ou même financières, comme au Canada, à Lake Louise, où après 40 ans d’organisation, les responsables songent à ne plus la programmer. Quel est votre sentiment ? 

Il y a certains endroits qui sont très attendus. C’est le cas au Canada, qui lance la saison de ski. Et d’imaginer qu’après 40 ans elle ne soit peut-être plus organisée, j’en serais très attristée. C’est aussi un endroit très spécial, le seul où tous les skieurs se retrouvent dans le même hôtel. C’est la première course de l’année. On se parle, on échange, c’est aussi une composante importante de l’harmonie de ce sport.

La marque horlogère suisse Hublot est partenaire de la championne de ski depuis deux ans (Hublot)

Votre sponsor, la marque horlogère Hublot, est à vos côtés à Crans-Montana. Quelle est l’histoire de cette rencontre ?

J’ai toujours rêvé d’avoir une collaboration avec une marque de montre, car j’aime vraiment ça. Et j’aimais déjà particulièrement Hublot, l’esprit qui s’en dégage, bien avant notre partenariat. J’ai rencontré Ricardo Guadalupe (ndlr. CEO de la marque Hublot), nous avons déjeuné ensemble, et la collaboration a commencé très naturellement, il y a deux ans. C’est une marque importante, internationale, mais où tout est très détendu et excitant à la fois. J’aime beaucoup rencontrer les équipes Hublot. Ce qui me plaît, c’est que je peux rester naturelle, je n’ai pas besoin de jouer un rôle, je peux juste être moi, et c’est important pour un sportif.

Comment voyez-vous les années à venir ?

J’ai maintenant de très intéressantes années qui m’attendent. On m’a demandé récemment si je pensais participer aux Mondiaux de ski à Crans-Montana en 2027, c’est toujours très difficile de le dire à l’avance, mais du moment que je ressens autant de plaisir à skier, je serai de toutes les courses. Je ne pense pas vraiment à une carrière future, car être un athlète de haut niveau prend toute votre énergie, votre tête, votre temps. Chaque jour de l’année est un entraînement de haute compétition, hiver comme été. Je donne également du temps quelques jours par an, à mes sponsors, pour des actions particulières, par exemple des journées dédiées aux jeunes générations, avec mon partenaire principal. J’aime l’idée de donner en retour ce que j’ai reçu. Et lorsque je suis en contact avec les jeunes générations de futurs skieurs, je sais ce qu’il y a dans leur tête, j’étais la même. Je me rappelle, jeune, lorsque j’ai rencontré Fabienne Suter ou Lara Gut : je les voyais comme des superstars, qui passaient à la télévision. Je voulais leur ressembler, faire comme elles. Et maintenant, les jeunes me regardent de la même manière, comme si j’étais quelqu’un d’autre. Mais non, je suis toujours la même, celle qui rêvait d’accomplir l’exceptionnel.

Que souhaitez-vous leur transmettre ?

Je veux leur transmettre cette même confiance, que tout est possible. Il ne faut pas être spécial. Le seul élément clé, c’est de skier avec plaisir, avec un sourire sur les lèvres. Il y a bien sûr de très mauvais jours, et j’en sais quelque chose… Mais il y a toujours un peu de lumière, même au fonds. Ce qui m’a aidée le plus lorsque j’étais blessée? Ce sont les histoires des autres championnes, particulièrement lorsque Lindsey Vonn m’a raconté ses accidents, et la capacité qu’elle a eu de toujours revenir, plus forte, plus rapide. Son livre est important. Elle y raconte ses mauvaises passent également. C’est un élément fondamental, il faut pouvoir en parler dans le milieu du sport. Car sur les réseaux sociaux, les jeunes n’ont qu’une vision idéalisée du sport, où il fait toujours beau. Et la réalité n’est pas ainsi.  

Corinne Suter est aujourd'hui au 4ème rang du classement général de descente (Corinne Suter)

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