Comment ID Genève a réussi à convaincre Leonardo DiCaprio

Plus médiatique, même si les deux millions de francs suisses ne proviennent, de loin pas, de son portefeuille, mais de plusieurs family offices suisses, l’investissement de la star planétaire Leonardo DiCaprio est un sacré coup de pouce à la notoriété de la marque suisse ID Geneve. Acteur et défenseur de l’environnement, il n’est pas à ses premiers placements financiers dans le secteur du luxe. Déjà principal investisseur de Diamond Foundry, Leonardo DiCaprio avait décidé en mars dernier de financer une partie de la construction d’une usine de production de diamants de laboratoire, en Espagne, une unité alimentée en énergie solaire. Depuis quelques années en effet, l’acteur de «Blood Diamonds» est devenu le porte-parole des mouvements opposés aux diamants naturels, source de conflits et de convoitise dans plusieurs zones du globe.

Aujourd’hui, c’est à la marque ID Genève, cofondée il y a trois ans par trois jeunes entrepreneurs Cédric Mulhauser (horloger), Singal Depéry (directeur artistique), Nicolas Freudiger (CEO) que l’acteur donne du crédit. Il affirme: «Je suis ravi d’avoir investi dans ID Genève, une marque qui insuffle le changement dans l’industrie du luxe – et au-delà – grâce à une approche basée sur l’innovation constante et sur les principes de l’économie circulaire.» En effet, la marque horlogère suisse basée à Genève, qui vient de recevoir - caution suprême et très complexe à obtenir - la certification B Corp, produit des montres mécaniques offrant la meilleure durabilité possible grâce à l’utilisation exclusive de matériaux recyclés, réutilisés ou renouvelables. Le but: afficher une empreinte carbone nettement inférieure à la moyenne de l’industrie et devenir zero mining d’ici 2025.

Le concept, inventé en plein Covid, est né grâce à un crowdfunding organisé en Suisse fin de 2020, permettant de financer les premiers investissements. Nicolas Freudiger, CEO de ID Genève, passionné d’horlogerie, mais sans réelle expérience dans le milieu avant cela raconte: «J’avais terminé mes études à l’Ecole Hôtelière de Lausanne en 2015, et après un passage de trois ans à Zurich chez CocaCola Suisse en tant que e-commerce et digital manager, où j’ai pu apprendre passablement de bonnes pratiques dans le digital, j’ai décidé avec mon meilleur ami horloger Cédric Mulhauser de fonder la marque ID Genève. Ce choix, motivé avant tout par notre passion pour l’horlogerie, m’avait aussi conduit à réaliser que, chez CocaCola, mener des transactions digitales et pousser la consommation n’apportait pas vraiment un réel sens à ma vie, malgré tout le respect que j’ai pour ce grand groupe. Nous étions vraiment passionnés par le milieu de l’horlogerie qui nous éblouissait depuis nos quinze ans. Le concept de la marque ID est né en pleine pandémie, sur l’idée de créer une nouvelle identité du luxe, en changeant complètement son narratif. Nous voulions montrer que créer une marque horlogère recyclée, basée sur l’idée de déchet pouvait avoir sa place.»

Depuis, la marque réalise chaque année des collections en petite série de 300 pièces ou 500 pièces, dont le lancement débute toujours par la sortie d’une Lab Edition. Vendues à 80% via le e-commerce et la ventes directe dans une quinzaine de pays, les montres sont aussi représentées dans une dizaine de points de vente physiques. Nicolas Freudiger poursuit: «L’objectif est de créer de l’impact et de prendre le leadership dans les montres éco-innovantes, et pour nous, les points de vente physiques sont un accélérateur d’image sur les marchés. Nous avons besoin des professionnels de la branche pour amplifier ce message, car nous visons de devenir le top of mind en termes de durabilité en horlogerie d’ici cinq à dix ans. De fait, la balance entre la vente directe et la vente classique se rééquilibrera. Le cérémonial de l’achat en boutique reste important.»

Autre levier accélérateur de notoriété, l’arrivée de Leonardo DiCaprio, non pas comme un simple ambassadeur, mais comme un investisseur, est bien plus puissant. Sur ce point, Nicolas Freudiger explique: «Lorsque l’on parle d’impact, avoir l’ambition de viser les rêves les plus fous est une donnée importante. Et dans ce cadre, j’avais mentionné mon admiration pour Leonardo DiCaprio dans une interview au New York Times en 2021. Et par des contacts mutuels, cette idée s’est concrétisée. Transformer l’industrie du luxe est possible, le changement de paradigme est envisageable, mais il faut pouvoir l’accélérer. Beaucoup de débats vont avoir lieu dans l’industrie, car il n’est plus soutenable que le 1% de la population mondiale soit responsable de 48% des émissions de CO2. Une décarbonisation de l’industrie a déjà commencé.  Et il est vrai qu’avec Leonardo DiCaprio nous sommes bien alignés sur ces idées. C’est un partenaire business sur le long terme. Bien sûr, sur la photo, il porte la montre, mais je sais qu’il aime la porter. A propos de la marque, je sais que Leonardo était déjà très intéressé par notre projet depuis pas mal de temps.»

En 2023, ID Genève pense produire 600 exemplaires, doublant la production par rapport à 2021. Sa toute dernière collection de montres, Circular S, est fabriquée en acier 100 % recyclé qui a été refondu dans un four solaire, réduisant ainsi son empreinte carbone par 165. Les bracelets des montres, d’origine végétale et entièrement compostables, font écho à l’engagement de la marque de réduire les déchets et de maximiser la réutilisation. Le même principe s’applique aux solutions d’emballage adoptées par ID Genève : celles-ci sont dérivées de champignons et d’algues.